À propos du livre
Genre
Poésie
Parution
1998
Éditeur
La Différence
Collection
Clepsydre
Extraits
Tu habites les bords du labyrinthe
et cherches inlassablement le passage
qui ramène à l’origine, – fut-elle ce point rebelle
cette masse trop dense venue d’autres passés.
Fragile particule d’air et d’eau
le long de la pente, qui remontes
et redescends, – tu étends ton corps épuisé
aux confins de la lumière. Qui suis-je
demandes-tu, mais nul ne peut répondre
avant que se retourne le sablier.
*
Chacun va, dans sa caverne d’enfant
retrouve les ombres animées d’oiseaux, de poissons
de reptiles sur les murs
ses jeux de sable et d’eau
qui emplissaient l’univers.
Toutes choses se dispersent, aujourd’hui
que la nuit chute dans l’immensité
le ciel qu’alors tu regardais comme un manège
a défait son chapiteau.
Tu regagnes le fond de l’enfance
où chacun est loin, si loin dans son monde
de figures éphémères.
Comme chacun, tu lutteras aux portes de la caverne
contre le reflet qui s’y glisse encore.
*
Nul n’est chez soi
ici, là-bas, l’unique espace
est le monde, l’intérieur du monde
que l’on gravit, pas à pas
jusqu’aux racines silencieuses du ciel, – gravir
plaines et océans, neiges et semailles
de nos pays de froids.
Nul n’est chez soi, ici
là-bas, nous creusons, nous cherchons
ces âges jamais perdus, jamais possédés
– le rivage où s’arrête la petite aiguille de nos vies.
Nul n’est chez soi. Ne possède rien.
Nul n’avance, ne va
plus loin qu’en lui-même.
*
Le jour décline, et l’arbre
enchâssé dans ses ombres
presse la mince couche de bleu.
Si maintenant je lève les yeux
et veille, tels ces blessés qui fléchissent
au portail des étoiles, si je lève les yeux
peut-être approcherai-je aussi
de cette destinée, – légère ascension
dans l’espace désolé.
Et le vent, maintenant le vent
sur la pierre oubliée, qui s’attarde.
Elle tombera bientôt, dans le magma d’autres pierres.
Ruines, ruines, disséminées dans l’histoire
– géométrie compliquée d’un monde
plongé dans la joie douloureuse du temps.
Saurai-je aussi me jeter
en moi-même comme en un puits, et sans filet
consentir à cette ombre qui pointe
vers d’autres lumières ?